Le corps en thérapie dans le traitement des psycho-traumatismes

trauma sensations

Cette approche se concentre sur le corps et ce qu’il nous dit, elle vise à utiliser les mouvements et les sensations corporelles pour aider à guérir les blessures traumatiques. En effet, le trauma empêche l’intégration car les souvenirs sont fragmentés, non intégrables. L’essence du trauma réside dans l’impuissance (aucune issue n’est envisageable), couplée à l’absence d’une personne protectrice. 

Dans cet article je partage ma lecture de l’ouvrage « Le trauma et le corps, Une approche sensorimotrice de la psychothérapie » de Pat Ogden, Kekuni Minton et Clare Pain. Editions De Boeck Supérieur

La thérapie a une visée intégrative

Il existe, mise en valeur par la neurobiologie inter-personnelle, une aspiration innée de l’humain vers l’intégration.

L’intégration est un processus qui relie des éléments perçus et vécus dans l’expérience afin de former un ensemble fonctionnel : cohérent, adaptable et suffisamment stable pour se mouvoir dans le monde, pour s’auto-réguler de façon ajustée à l’environnement. L’intégration de nos expériences permet la création d’« états intégrés » qui établissent notre auto-régulation adaptative.

Auto-régulation : capacité pour une personne de revenir à un état (physiologique, émotionnel et cognitif) suffisamment stable pour s'ajuster.

Cette intégration est parfois freinée par nos « tendances à l’action » : ce sont des prédispositions, conditionnées par le passé et déclenchées quand dans l’actualité on perçoit des signaux rappelant ce passé. Ces « modes automatiques » (dont beaucoup nous sont indispensables comme quand on marche… on n’a heureusement pas besoin d’y penser) peuvent donc surgir, s’imposer, empêchant nos autres niveaux de traitement de coopérer.

thérapie intégration

Les niveaux de traitement, la place du corps dans la thérapie

On distingue de façon simplifiée et pédagogique 3 niveaux de traitement de l’information par le cerveau, niveaux entrelacés et inter-dépendants : le cognitif (néo cortex), l’émotion (limbique) et le sensorimoteur (reptilien).

trauma sensations

Le fonctionnement optimal des niveaux dits supérieurs (La notion de supérieur-inférieur est liée au développement de l’humain, le niveau le plus ancien (dit inférieur) étant le reptilien, puis dans l’évolution est apparu le limbique et enfin le cortex) est tributaire du bon fonctionnement des niveaux dits inférieurs. 

Dans un fonctionnement régulé, le stimulus, interne ou externe, entraîne une réaction à un –ou des- niveaux inférieurs très rapide, et il y a possibilité de suspendre ces réactions pour mettre dans la boucle un – ou des- niveaux supérieurs.

Cette alliance des 3 niveaux est nécessaire à toute intégration. Elle est le signe d’un état « intégré ».

Etat intégré : capacité à observer et prévoir pour inhiber, organiser et moduler nos réponses automatiques. Ainsi on préserve nos liens, indispensables à notre sécurité et à notre construction du soi.

Théorie polyvagale

On retrouve ces 3 niveaux dans la « hiérarchie polyvagale » : le fonctionnement des systèmes para-sympathique (nerf vague) et sympathique est décrit à travers 3 systèmes

  • d’engagement social, le plus sophistiqué (ventral du nerf vague)
  • de mobilisation, qui est le mécanisme de survie permettant face à un danger de fuir ou combattre
  • d’immobilisation, dernière ligne de défense face à un danger et la plus primitive (dorsal du nerf vague)

Thérapies ascendante et descendante

trauma sensations

3 points d’entrée sont ainsi possibles en thérapie :

  • Le cognitif, appel conscient aux mécanismes de régulation par le haut
  • L’émotionnel
  • Les réactions somatiques

L’objectif est de générer une action thérapeutique sur les 3 niveaux, condition nécessaire à l’intégration.

En thérapie descendante, un changement au plan cognitif et émotionnel, par le langage, le travail sur les croyances et les affects, dans le cadre d’une relation thérapeutique, vise l’amélioration du sens de soi.

En thérapie ascendante, l’attention est d’abord portée sur l’expérience que la personne a d’elle à travers ses sensations (souvent fines voire opaques), ses gestes, ses mouvements… afin qu’elle accède à un sentiment de maîtrise physique et de connaissance de soi. Le but est de développer dans un premier temps des ressources somatiques de stabilisation.

ressources stabilisation

En effet, le trauma a exclu l’intégration – l’expérience traumatisante est fragmentée et cloisonnée dans des espaces dissociés et les « tendances à l’action » sont alors très ancrées, elles ne peuvent être suspendues. La stabilisation n’est pas accessible.

Cette approche est complétée par un travail sur les croyances et les émotions par la narration, afin de travailler sur les mémoires traumatiques et accéder à l’intégration somatique.