« Un seul être vous manque et tout est dépeuplé »
Ces mots du poète nous parlent de la solitude source de souffrance
On peut dire qu’il y a différentes solitudes : solitude-souffrance, solitude-ressource, isolement social (solitude inter-personnelle), et solitude existentielle.
Le confinement, total ou partiel, nous confronte tous et toutes à une diminution importante des liens sociaux, amicaux, familiaux.
Cet isolement social contraint nous fait prendre conscience à quel point nos liens aux personnes sont des ressources nécessaires, dans notre vie quotidienne, à notre bien-être et à notre équilibre : être seul – vivre – face à la complexité du monde est une expérience qui a besoin de soutiens : de liens intimes et de liens sociaux.
Cette solitude peut être vécue comme bienvenue, source de réflexion sur soi, dans un environnement peu sollicitant, donc apportant suffisamment de calme et d’espace.
Elle peut être source de souffrance, quand on se vit comme vide, vidé, inexistant s’il n’y a pas un « autre » à nos côtés. Elle surgit lors de deuils, de séparations… Elle est aussi source de souffrance, et même d’angoisse, si nous la vivons comme une solitude existentielle.
La solitude existentielle est quant à elle liée à notre condition humaine. C’est une réalité de notre « être humain ». C’est la conscience que « personne ne peut vivre ma vie à ma place ».
En d’autres termes, la solitude existentielle est le fossé qui ne peut être comblé entre soi et les autres, soi et le monde.
La mort fait éprouver cet isolement : on ne peut mourir avec ou pour quelqu’un et personne ne peut mourir pour nous. C’est en ce sens que l’on parle d’expérience solitaire. La liberté aussi fait éprouver cet isolement : nous sommes seuls à être responsables de notre existence. Il n’y a pas un autre (créateur, individu…) qui agit et décide pour nous.
Nous avons, pour la plupart d’entre nous, développé des stratégies, des savoir-faire, pour éviter de nous confronter à la souffrance et nous assurer un minimum de bien-être : en ne vivant jamais de relations (on ne risque pas la séparation) ou en surinvestissant les relations (le nombre évite que « tout lâche » en même temps). Afin de garder le lien pour ne pas être seul, nous multiplions les contacts ou en développons un « avec acharnement », aussi par nos addictions (autres dépendances), l’hyperactivité… toutes stratégies de « remplissage ».
Il s’agit surtout de ne pas se juger quant aux stratégies que nous mettons en place. Et d’accepter qu’on évite ainsi la souffrance. Par contre s’il y a répétition d’évitement, s’il y a souffrance du fait même de l’évitement, alors il est important de se poser la question « est-ce que ça me permet de grandir ? »
La thérapie pour faire face à la solitude
Le processus de croissance est un processus de séparation : ne pas se séparer c’est ne pas croître. La résolution du dilemme « fusion/isolement » ou « attachement/séparation » est la principale tâche de la croissance en psychologie.
La solitude est alors perçue non comme une séparation mais comme une différenciation… et une reliance (point commun entre tous les êtres humains).
Le travail sur les peurs
est là encore très important : identifier les peurs qui nous coupent de nous-mêmes, et des autres. Ces peurs sont plus ou moins conscientes, violentes, archaïques…
Au niveau inter-personnel, par exemple, la peur d’être jugé, de ne pas être à la hauteur est parfois présente, et plutôt consciente. De même la peur d’être déçu par l’autre, de s’ennuyer, ou encore que l’autre ne soit pas à la hauteur de nos attentes.
Des peurs plus archaïques
sont plus complexes à conscientiser. Elles agissent sur nos comportements à notre insu, et pourront être dévoilées en thérapie grâce à un lien de confiance. Il s’agit par exemple des peurs de détruire l’autre, de montrer « le monstre que l’on a en soi », ou le vide que l’on sent en soi, de se montrer vulnérable, de ne pas être aimable, ni légitime d’exister… enfin il y a la peur d’être submergé (perte de contrôle avec toutes les conséquences qu’on peut imaginer).
Et concernant la solitude existentielle,
c’est l’angoisse que nous ressentons alors. L’angoisse existentielle est là pour nous mettre en mouvement, elle nous confronte à notre responsabilité de faire quelque chose de notre éprouvé, et de prendre la responsabilité de notre vie, en développant notre liberté.
La seule solitude inévitable est la solitude existentielle.
La Gestalt-thérapie, thérapie existentielle, propose de faire face à notre solitude et d’appréhender notre condition humaine, dans ses ressources et ses limites.